Créée en 2015 et réellement opérationnelle depuis seulement six à sept ans, la Société Nationale de Transport de l’Électricité (SONATREL) s’impose progressivement comme un pilier du système électrique camerounais. Dans un contexte souvent marqué par des confusions entre les rôles des différents acteurs du secteur, l’entreprise publique multiplie les efforts pour sécuriser, moderniser et fiabiliser le transport de l’énergie sur l’ensemble du territoire.
Car si de nombreux consommateurs associent encore à SONATREL les difficultés d’accès à l’électricité, il est utile de rappeler une distinction fondamentale : SONATREL transporte l’énergie, tandis que ENEO la distribue aux ménages. Or, c’est précisément dans cette zone d’interface — transport d’un côté, distribution de l’autre — que se concentrent de nombreux malentendus publics.
Une mission complexe, un réseau sous pression, mais des résultats visibles
Depuis sa mise en service opérationnelle, SONATREL a dû reprendre, moderniser et sécuriser un réseau national de transport vieillissant, étendu sur plusieurs milliers de kilomètres et interconnectant des infrastructures stratégiques telles que Songloulou, Edéa, Nachtigal ou encore les postes d’interconnexion régionale.
En moins d’une décennie, l’entreprise a piloté :
- le renforcement de plusieurs lignes de transport haute tension,
- la mise à niveau de postes électriques critiques,
- l’intégration progressive de nouvelles capacités issues de barrages récents,
- l’amélioration des mécanismes de supervision du réseau,
- la coordination technique avec les producteurs et le distributeur.
Des performances d’autant plus notables que SONATREL opère dans un environnement où les contraintes financières du secteur se répercutent sur sa capacité d’investissement.
Une partie des difficultés rencontrées par les consommateurs relève davantage de la distribution que du transport. À fin 2024, ENEO Cameroun affichait un endettement global de 800 milliards FCFA, dont 500 milliards de dettes envers ses fournisseurs et 80 milliards de créances non recouvrées.
Parmi les créanciers figurent plusieurs entreprises publiques essentielles à la chaîne électrique : SONATREL pour le transport, EDC pour la gestion des barrages réservoirs, Sonara, SNH–Tradex, ainsi que le régulateur ARSEL.
Cette situation financière fragile pèse indirectement sur la chaîne entière : retards de paiement, tensions de trésorerie, difficultés d’entretien, mais aussi retards d’investissement dans la distribution — ce dernier maillon auquel les citoyens sont directement confrontés au quotidien.
Dans ce contexte complexe, les efforts continus de SONATREL méritent d’être soulignés.
En quelques années, l’entreprise s’est imposée comme un acteur stratégique dans la sécurisation du réseau interconnecté, la gestion technique des flux d’énergie entre producteurs et distributeur, l’évacuation de nouvelles capacités comme celles de la centrale de Nachtigal, la résilience du système face aux incidents, la planification du futur réseau national.
SONATREL a également renforcé sa collaboration avec les institutions de régulation et les autres entreprises publiques du secteur, élevant progressivement les standards de contrôle, de transparence et de reporting technique.
À l’heure où la demande nationale en énergie augmente, où de nouveaux barrages entrent en service et où les attentes des citoyens sont plus fortes que jamais, il est essentiel de reconnaître le rôle réel joué par chaque acteur du secteur électrique.
SONATREL a encore des défis à relever, mais pour une entreprise jeune, confrontée à un réseau hérité et à un environnement financier tendu, son évolution rapide constitue un signal positif pour l’avenir du système électrique camerounais.
Clarifier les responsabilités, soutenir les investissements, renforcer la coordination : c’est dans cette dynamique que le pays pourra bâtir un secteur électrique plus stable, plus performant et mieux compris par tous.
Auréole TCHOUMI